« Si l'imbécile persistait dans sa bêtise, il deviendrait sage. » Je reprends ce proverbe de William Blake à mon propre compte. Je suis cette imbécile qui ne sait pas ce qu’elle cite, qui grandit avec la formule, qui collectionne les aphorismes, et qui adore prendre un bon bain de poésie pour le plaisir de se sentir baignée nue et sans entrave. Je n’en retire aucune science, aucun argument, aucune conviction, aucune méthode si ce n’est de continuer ce chemin obscur où je nourris ma bêtise comme une imbécile. Et voila que je suis comme je l’écris, tour à tour, écrivaine, romancière, poète, éditorialiste, autrice de théâtre tout cela sans la moindre formation, sans la moindre déformation, avec en paysage de fond le souvenir frontal des discussions au lycée et à la fac avec les professeurs qui se souciaient de me faire comprendre la littérature, de me faire parler sur, alors que je nageais entre les mots comme une sirène sauvage, que j’étais agitée par le tempête qui fouettait mon cœur, habitée quotidiennement par une tentative têtue d’énoncer ma pensée et de découvrir que quand je parlais fort, je commençais à parler, je commençais à penser et je parlais-pensais comme une imbécile. De toutes ses découvertes j’en ai gardé beaucoup d’égratignures que je n’ai pas soignées et tant de secrets mal énoncés qui sont aujourd’hui toutes les  épaisseurs de ma langue et de mes images qui se frottent les unes aux autres comme des allumettes cherchant à prendre feu. J’écris pour être parlée et que l’histoire advienne dans un corps imbécile. William Blake je suis l’imbécile dans un monde de fous qui attend que la sagesse arrive !