juin 2018
Je suis terrassée au fond de mon lit, devant le prix à payer de ce mois de mai de luttes avortées. Le glas a sonné, mai 68 est enterré, Olivier P. et Stéphane B. en toute intimité ont fermé la bouche aux rescapés, Macron danse comme un possédé sur le corps de la ZAD éventrée, les étudiants poing levé sont criminalisés, la rue pue le Macdo cramé et les troupes disséminées font la manche à tous les gradés. Comme on fait son lit on se couche mais on ne fait pas l'histoire dans son lit. Dans ma tête fatiguée, il n'y a plus que mon texte qui défile: Tentative(S) de Résistance(S) n°1, Top timing ! Aujourd'hui je suis couchée, fini la danse du cheval et les soirées endiablées, fini la joie des enculades démocratiques, la virilité sur-dosée, l’explosion des Mariannes emplâtrées, les mises à nue burlesques, les parades gargantuesques et les banquets. J'ai épuisé le stock. Pourtant la résistance chez moi, ça a commencé quand, petite fille, j'organisais, avec tous les gamins de la cour de récré, un grand jeu aux dimensions de la cour, avec des indiens et des cow-boys, des sauvages et des courageux, des victimes et des guerriers, des stars, des punks et des princesses humiliées et que tous avaient un grand rôle et un combat à mener et qu’il y avait, des cérémonies, des engueulades et des défilés. Et bien à cette époque là aussi, ça s’est mal terminé et j'ai été interdite de cour de récré. Toutes les maîtresses se sont réunies et m'ont dit que mon jeu était trop compliqué, que je ne pouvais pas inventer les règles au fur et à mesure, qu’avant moi personne ne jouait à ce jeu là. Alors je me dis, du fond de mon lit, que c'est ça qu'il faut faire, reprendre les rennes de notre liberté, de nos jeux et de notre vie, qu'on n'a pas le choix et que comme personne ne fera ce combat à ma place, je dors un peuet je m'y mets !
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