C’est mon histoire, la mienne, la mienne et celle des autres.Je ne vais pas vous montrer ma carte d’identité. Je ne l’ai pas.
Je suis blanche, ça sevoit, je peux vous dire que je suis française de père de mère. L’identité ça ne separtage pas. Je ressemble plus à mon père, c’est plus facile car il est mort jeune et il estresté beau. Et ce n’est pas que je sois belle. La beauté ça ne se partage pas. Je suisfrançaise, c’est écrit. Mon identité, elle est sous plastique, on n’y touche pas.Je suis une femme, signe distinctif : tour de poitrine 95B. Je suis une femme et souvent deshommes m’abordent et me demandent si c’est moi qu’ils ont vu un jour, un autre jour, avant.Pourquoi ils me disent ça, comme ça ?Je suis obligée de me demander non pas si j’ai déjà vu cet homme parce que celui qui meparle comme ça moi je ne l’ai jamais vu, non je suis obligée de me demander si je ressembleà quelqu’un et je réponds : « A qui je ressemble ? » « Non à toi, ils disent, tu te ressembles !À toi » Les hommes selon moi disent n’importe quoi pour parler. Pour communiquer ils sontprêts à tout, même à être idiot. Et puis, ils ne sont pas très visuels, ils ne voient pas lesdétails, ils se trompent quand ils identifient. C’est pour cela qu’ils ont besoin de spécialistepour nous identifier et qu’ils ont inventé un papier, une carte qui certifie que, moi je suis moi.Que lui il est lui, sans cela ils sont perdus.Un homme t’aborde toujours en te disant qu’il t’a vu, avant. Alors soit, il ne voit pas bien soit,il a la mémoire courte et tout cela ne joue pas à son avantage.Moi, aux hommes, dans la rue, je leur cloue le bec en leur disant : « Tu veux ma photo ? » etavant qu’ils ne répondent je leur dis : « Je te la fais en un clic la photo, la photo du jour ! Clictu me vois ! Clic tu ne me vois pas » Et je disparais.Et sa photo de moi, soit il l’a sur le fond de sa rétine et il me dira qu’il me connait laprochaine fois qu’il me voit, soit il n’a pas eu le temps d’imprimer la photo et il me redira uneautre fois « On se connait, on s’est déjà vu quelque part ? » Parce qu’un homme n’arrivepas à comprendre qu’il ne me connait pas, qu’il ne me connaitra jamais. Même moi j’ai desproblèmes à savoir qui je suis.Enfin eux, ils ont le droit d’être stupides, c’est culturel. Bref ! Pour l’instant je ne prends pasde risque et je le garde à distance l’homme qui a l’impression de me connaitre, je le garde àdistance, lui et ses bonnes blagues.Photo ou pas photo, mon hérédité est trouble. Et je mets en plus du flou par-dessus sinon jeserais obligée d’afficher mes origines catho 100% et je n’ai pas de très bons rapports avec lepape.Car là aussi il faudrait que je lui dise ce qu’il a envie d’entendre sur ma vie à cet homme là.Et mes 4 avortements il ne saurait pas quoi en faire et ma carte de bonne chrétienne il n’estpas prêt de me la délivrer.Et pourtant je ne suis pas née en Angola. Là-bas il recrute le pape, pour sa chapelle Sixtine,il va voir sur place la marchandise et il accepte tout le monde. Mais pour les femmes c’estplus dur d’être intégré dans la grande famille. Depuis le début il n’y a que les hommes quiparlent dans cette église, le père, le fils et le saint esprit. La mère, elle est restée vierge c’estdire qu’ils n’ont jamais rien compris à la femme. C’est pourtant pas compliqué decomprendre que l’enfant il sort du ventre de la femme et qu’une vierge ne peut pas êtremère. S’ils avaient éclairci l’histoire dès le début on n’aurait pas tant de problèmemaintenant. Mais une fois que c’est sacré c’est sacré et on ne peut pas revenir dessus. Lepape et toute sa clique se retrouve entre hommes, et ils ne veulent pas voir en face le ventrede la femme.C2En 2009, c’est toujours impossible d’intégrer une femme dans l’Eglise. Une femme quiparlerait au nom des femmes, au nom des femmes et des hommes et qui ne serait pas justelà à genoux à se plaindre avec un chapelet ou un mouchoir à la main.En Angola, le pape il va les voir les pleureuses et il n’a pas d’état d’âmes envers elles. Ilparle du viol comme d’une réalité objective de la femme. La femme et le viol un coupleinséparable ! Il va loin le pape, il dit que l’enfant issu du viol, cet enfant là défiguré par laviolence, c’est un enfant de Dieu donc c’est sacré donc la femme violée elle doit accepterl’enfant. Elle doit le garder, garder en elle la trace de l’horreur, le faire pousser dans sonventre, l’accoucher, l’élever. Elle ne doit pas avorter, avorter c’est un crime. Mais bon sangde bonsoir comme disait ma grand-mère celui qui a commis le crime c’est l’homme qui aviolé, non ?« Non les femmes ne doivent pas avorter il y a va de leur santé ! »Alors moi et mes avortements, ces avortements qui ne sont pas inscrits sur ma carted’identité, ces 4 oeufs fécondés que je n’ai pas porté dans mon ventre, ces quatre visagesinconnus, ces quatre foetus qui rodent dans ma tête ils peuvent bien hurler du fond de mesentrailles, le pape n’en saura rien.Ce pape là il excommunie à tour de bras !!!Et moi je crie du fond de moi, du fond de mon ventre je crie mais vous ne m’entendez pas.Je hurle avec toutes les femmes qui regardent le foetus expulsé, le sang versé en sedemandant dans quel ordre va le monde. Je crie des mots silencieux qui ne sortent pas dema bouche.Je suis l’avorteuse avortée, l’avortement non déclaré qui n’est pas écrit sur ma carted’identité.Mon identité elle se porte bien protégée sous plastique, immunisée.Et je regarde les hommes et je me demande si je reconnais le violeur qui rode en eux. « Onse connait ? »Elle chantonneR / Je ne suis pas faite pour l’amour (ter)Mais pour être incendiée1) On ne choisit jamais son pèreOn rêve tous d’égalitéEt selon quelle était notre terreNotre vie est bien cher payée2) Je ne supporte pas la misèreJe voudrais tout transformerPlus ça va, plus je désespèreAttention ! Je vais exploser4) La nuit je pense au cimetièreOu mes amis sont rassemblésCancer, sida ou suicidairePour vous je continue d’avancer5) je me terre, je ne fais que me taireDevant si peu d’humanitéEt je rêve, je rêve en solitaireA un monde de liberté3Moi ma vraie famille c’est les gens qui défilent. Mon CV c’est leur banderole « Moi c’est elle -elle c’est moi » Moi c’est elle, la femme qui défile derrière la banderole c’est moi et c’est mavoisine.Ma voisine qui hurle c’est moi, c’est moi et c’est elle qui hurleOui les femmes hurlent.On le dit / On l’entendAujourd’hui celle qui hurle c’est moiDans sa bouche ouverte, c’est mon miroir hurlantDans sa bouche c’est ma langueAvec tout autour toute l’actualité qui me donne le vertigeElle que j’entends et moi en silenceMoi si blanche elle écarlateMoi je suis blancheBlanche cela veut dire : ne pas être contrôlée - ne jamais être contrôlée - pas une seule foiscontrôlée à Paris – jamais contrôlée dans le métro – jamais en trente ansJ’ai une bonne tête de française, moi Madame, Monsieur,Je ne suis pas contrôlée mais j’ai ma carte dans mon sacUne belle carte valable jusqu’en 2011 dans mon sacUne CARTE RF RF RF RF République FrançaiseUne carte d’identitéUne identité numérotée N° 01 03 75 P 00 471J’ai honte de mon apparenceParée de mas appâts pâles mon apparenceJ’ai un coté paré intégré qui me colle à la peauJ’ai honte de moiJe suis française et ça se voitJe suis française de FranceUne vraie françaiseC’est pourquoi les policiers me laissent en paixEn paix en paix les gardiens de la paixEn paix avec qui ?En paix avec quel moi-même ?J’ai un moi même « incontrôlable - incontrôlé » qui hurle au fond de moiAu fond de moi je suis noire comme disait Frantz FanonNoire sous la peauSous ma peau de blanche qui se contente de bronzerMa peau de blanche qui me colle à la peauMon manque de peau ah !Je hurle noir mais vous n’entendez rienJe hurle dans ta langue sous la banderoleQuitte à y laisser ma peauMa peau - horrible peau - oripeauMoi, la couleuvre citadine j’aimerais changer de peau mais surtout pas retourner ma vestecomme certainsMoi qui présente si bien, je suis une femme qui déjoue la peauOn en a ou on en n’a pas « du » peau !Je jette au feu la peau que les autres me reconnaissentUne peau qui me permet de faire partie des leursQue de leurres ! Que de leurres !! Que de leurresQue je finisse en poule au pot ! Et qu’on me fasse la peau !Ma langue fourche sur le sens inscrit au profond de ma langue4Arrachez-moi ma langueMa langue françaiseJe hurle mais vous n’entendez rienMa sale peau de blanche me fait hurler,Je regarde : là ce sont mes mains - là mon ventre – là ma peau - là ma peauJe me regarde et je ne m’y reconnais pasMon blanc pays blanchi qui se vanteMoi si bien intégrée à la France inquiète la France cette grande dame en manqued’amour qui demande à tous les étrangers:« Tu m’aimes ? Tu m’aimes ? Tu m’aimes ? »Et qui, tout en souriant donne son verdict assassin« Si tu ne m’aimes pas, vilain ! vilain ! Dégage ! »Cette blanche peau n’est plus la mienne.Faites qu’il ne soit pas trop tardLa peau comme une enveloppeLa peau qui annonce la couleur, mais la couleur de quoi ? De qui ?Qui parle de couleur ?Merde !! Toutes les entrailles sont rouge vif !!Dans notre beau pays des tripes à la mode de Caen ??Quand a commencé l’histoire de ma peau ??? Qui a écrit sa blancheur ?Regardez-moi « je suis une noire sans peau, une noire écorchée vive,Une noire qui ensanglante le blanc virginal de sa culture.Je saigne et on en fera un bon boudin noir !!!Je saigne sur la France, je saigne sur Marianne, je saigne comme un cochon sous labanderole.La journaliste soudanaise menacée de 40 coups de fouet pour avoir porté en public une"tenue indécente" c’est moi.Je suis cette femme qui a reçu un coup de téléphone des autorités disant qu’elle devaitcomparaître devant le juge. C’est moi Gigi la tondue ! Boudin foutu ! C’est moi qu’ils vontfouetter 40 foisC’est à moi qu’ils vont imposer une amende de 250 livres soudanaises, c’est à moi de payerles 100 dollars ! Ça fait cher le boudin !C’est moi qui vais être fouettée et je ne suis pas la seuleOn est 12 aujourd’hui (douze apôtres sans couille, je dis ça juste pour voir si le papem’écoute), On est 12 aujourd’hui, demain on sera 100.Elle fredonne« Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers.La la la …Ils étaient vingt et cent, nous sommes des milliers.La la laQui me dit à présent que ces mots n'ont plus coursQu'il vaut mieux ne chanter que des chansons d’amour »STOP moi je ne suis pas faite pour l‘amourAlors venez vite nous compter, nous les femmes soudanaises avant que nous ne soyonsplus que des corps ensevelis.Je hurle là ! Je hurle ! Mais vous ne m’entendez pasEst-ce que je crie ?Est ce que vous m’entendez crier ?Non je vous parle si tranquillementPas d’esclandre, on est entre gens biens, on se respecte, on s’écoute5Aujourd’hui on ne va quand même pas desceller les pavésOn est en ville, en plein Paris !!Je ne vais pas hurler !Un dimanche en plus !!Non ! Je ne suis pas sur la place de la concorde, avec 100 000 personnes, en train d’hurlerdans le mégaphone.Non ! Je ne suis pas sur la place de la concorde, avec 100 000 personnes en traind’accrocher mes lambeaux de peau sur l’obélisqueNon ! Je n’ai pas réuni 100 000 personnes sur la grande place de la concorde pour hurlercontre le pape et tous ses copains violeurs de guerreNon ! Nous ne sommes pas sur la place de la concorde en train de tourner en rond autour dutotem, trophée de guerre, symbole de virilitéNon ! Je ne suis pas Johnny Halliday !Non aujourd’hui il n’y a personne sur la place de la concorde et quand je crie vous nem’entendez pasMais ce n’est pas un hasard si je n’ai pas réuni 100 000 personnes sur la grande place de laConcorde, car par les temps qui courent et ils courent plus vite que les bagnoles, par lestemps qui courent je dois rester au calme, à la maison à la rigueur dans un théâtre à causedes risques de "pandémie".Et c’est interdit de réunir 100 000 personnes sur la grande place de la Concorde parce que larue n’est pas un stadeEt que 100 000 personnes sur la grande place de la Concorde, c’est trop - c’est tropd’humain – et c’est trop humain tant d’humains !Trop d’humain c’est dangereuxCet été des programmateurs de festival de rue ont annulé des spectacles à cause de lagrippe H1N1 !!Alors je peux vous le dire tranquillementCar même si je hurle vous ne m’entendez pasLa grippe H1N1 va faire des ravages !Oui vous allez tous mourir !!!!!!Mais ne vous inquiétez pas le pape va tous nous bénir !Ça va être l’hécatombe tombe, tombe, tombe !!!!!Dans tous les pays du monde, monde, monde !!!Saoud, pourquoi es tu parti ?Je voulais juste regarder le soleil couchant et sourire aux passantsSaoud, tu es parti mais moi je n’ai pas déménagé,C’était hier quand je suis arrivéeA ParisHier - Il y a plus de quarante ansC’était moi il y a quarante ans, la femme qui débarque dans son « une pièce-cuisine ». Lepremier jour, la première fois, j’ai pleuré. Je suis arrivée dans ce mon « une pièce-cuisine »et j’ai pleuré. J’ai pleuré parce que j’étais contente ! Parce que je sortais de l’hôtel. Je suisarrivée et j’ai pleuré. Pas parce qu’il n’y avait pas d’eau chaude, pas de chauffage, pasd’électricité Non ce n’est pas ça qui m’a fait pleuré. Non, c’est la pourriture, le moisi, lesgravas dans l’évier, les trous dans les murs et la merde partout, c’est ça qui m’a fait pleurer.Du noir jusqu’au plafond ! Ils avaient dû faire du feu, il y avait de la suie partout. Il n’était pascher mon « une pièce-cuisine » ça c’est vrai. il n’était pas cher, mon « une pièce-cuisine » iln’était pas cher parce qu’il n’y avait pas de cuisine. Et les chiottes c’était une cuve à charbon,une cuve à charbon où il n’y avait plus de charbon. Et l’ouverture du coffre à charbon arrivaitdirectement dans la cuisine qui n’était pas une cuisine. L’ouverture du coffre à charbonarrivait directement à la gazinière, enfin, à la cuisinière à charbon mais il n’y avait pas de6cuisinière à charbon ni cuisinière ni charbon juste le noir partout! Et dans la chambre, il yavait une énorme aération pour mettre le poêle à charbon, sauf que moi, je n’avais pas depoêle, pas de cuisinière et pas de charbon. Je voyais ce noir devant moi et je pleurais. J’aiemménagé le premier mai. J’ai tout repeins en une nuit, papiers peints et peinture, j’ai peinspar-dessus la merde. J’ai blanchi le noir et j’ai épongé les larmes. Dans le noir parce que jen’avais pas la lumière, qu’est ce que j’ai pleuré ! Et au bout de deux jours, je me suis dis :« Je suis arrivée, je ne me casserai plus jamais ! Je ne me casserai plus. Je ressortirai lespieds devant ou par la force des baïonnettes. »Et depuis je n’ai pas déménagé.Saoud tu es né là dans ce « une pièce-cuisine » que j’ai blanchi de mes mains. A Paris. UnParis qui accueille les bancales, les frôles la mort, les brigands et les violents.Tous les violents ! Les hommes, les pères, les maris, les voisins. Tous des endiablés de laviolence.C’est difficile à regarder en face la violence.Lui mon capuchonné il est entré comme une liane, comme un serpent souple et d’un seulcoup il s’est transformé en tigre et il m’a cogné, mais si ça se trouve c’est un gentil gars.Il m’a cogné et c’est la vue du sang qui l’arrêté. Comme le sang de nos règles peut arrêter unvioleur.Le vue du sang l’a arrêté. Le sang ça excite les hommes ou ça les arrête. Comme les bêtes.Comme des bêtes. C’est tout l’un ou tout l’autre.Lui il était seul il n’était pas en bande.Et même si on me dit que mon loustic capuchonné appartient à l’une des 222 bandesconnues en France et répertoriées soit disant par le ministère.La violence de celui qui surveille ça me débecte plus que la violence de celui qui me tapedessus.Le ministère il pond des textes pour enfermer les gamins. Et celui qui m’a cogné, mon gaminà la bombe lacrymogène, s’ils le trouvent, ils vont le mettre direct en taule. Et il ne pourra pasdire qu’il se sent trop serré dans sa toute petite cellule parce qu’il y a déjà 3 gars qui y sontinstallés. Non il devra se consoler en se disant qu’à quatre c’est le nombre idéal pour jouer àla belotte !!Depuis Zola, Paris n’a pas changé, il y a toujours eu des bandes.Et dans mon quartier de Pernety à la porte de Vanves il y a des bandes.Mais lui le gamin qui m’a cogné, il est venu tout seul.Il a fait irruption, il m’a bombé le visage, les yeux. Il a vidé la bombe, il m’a cogné puis il estreparti.Il est venu seul il est reparti seul mais avec mon ordi.Dans mon quartier de Pernety à la porte de Vanves il y a des bandes.L’autre jour il y a eu un attroupement. Il était cinq heure pas plus. Des enfants plein la rue.Franprix ouvert.Au pied de l’immeuble. En bas de chez moi. Trois, quatre coups de feu !Un jeune homme qui court et puis qui s’affale. Je ne suis pas restée tout le temps à mafenêtre. J’ai vu un groupe de jeunes. J’y suis habituée à leurs attroupements.Ils sont là sans rien faire. Toute la journée à attendre, à se parler, à se taper sur l’épaule, àtourner autour des voitures. Des voitures qui arrivent et qui freinent au dernier moment, vitrebaissée ! Que des gars ! Ils sont toujours au même endroit. Ils ont la dégaine, les coups degueules et les accolades qui vont avec. Ils ne sont pas devant une entrée, devant une porte,non. Ils n’entrent nulle part. Il n’y a pas de café, juste un petit coin d’immeuble.Un bout de trottoir où ils peuvent se tenir des heures durant.Rien que des gars entre eux, de plus en plus nombreux.7Des qu’on n’avait jamais vu, des plus jeunes, des plus vieux.Il a fallut que ça tombe un mercredi avec tous les enfants qui jouaient et qui passaient dansla rue ! Le danger !Un voisin du dessous les avait filmés quand ils trafiquent.Ils trafiquent et alors ? Le trafic, la drogue cela n’a aucun rapport.Ceux qui disent que c’était prévisible, ils se trompent !Je ne vois pas le prévisible, ni le visible d’ailleurs.Moi ce jour là, j’ai vu un peu comme d’habitude sauf que là il y a eu un enchaînement et çaon ne pouvait pas prévoir. C’est facile après de mettre tout dans l’ordre.Mais c’est quoi l’ordre de ceux qui comme moi ne savaient rien ?L’ordre n’est pas celui qu’on croit ! C’est facile après de raconter toute l’histoire “ Je savaisque cela tournerait mal, je l’avais bien senti… ” Avant, rien n’est relié.Moi, je n’avais rien senti. J’ai vu l’attroupement par la fenêtre.C’est comme avec mon gamin je n’avais rien prévu, rien du tout.C’est le bruit qui m’a attiré. Pas les coups de pistolets, non !Je les ai entendus, mais je n’ai pas du tout compris que c’étaient des coups de feu.Des petits “ poutt ! poutt ! ” Trois ou quatre… Beaucoup moins fort que les pétards !C’est quand ils ont commencé à lancer les bouteilles !Ils se retrouvent à côté… Je ne sais pas comment ça s’appelle, le gros bidon pour récolterles bouteilles, un récolteur de verre ?Celui de ma rue, c’est pratique, il est juste en face de ma porte d’entrée.Le collecteur de verre, il se remplit à toute vitesse, c’est impressionnant !On est tout un tas à boire dans ce quartier.Et c’est à cause de ce bidon que tout a dégénéré! Le récolteur était plein et il y avait un tasde bouteilles tout autour.Ils n’avaient que l’embarras du choix : les canettes de bières, les bouteilles de vin, lesbocaux de cornichons…Ils prenaient ce qui venait et en avant ! ! Un seul à la fois. Comme un dératé, la bouteille bienen main et il fonçait !Moi de là où je suis, j’entendais juste le bruit du verre qui s’écrasait sur le bitume et je voyaisle gars qui revenait à toute vitesse. Après on m’a dit qu’ils attaquaient les autres cachés sousle pont.Le pont qui passe sous la voie ferrée et qui sépare le quinzième du quatorzième.Dans ma rue, presque sous mes yeux.Sous le pont, la rue change de nom. Elle s’arrête avec le pont. C’est la limite. La frontière.On peut se battre pour des choses comme ça.C’est dangereux !Qui savait avant ce jour-là que cette frontière existait ?Pas moi.Même si je n’aime pas passer sous le pont.C’est mal éclairé. Il y a des débris, des voitures garées, vitres ouvertes, des odeurs d’urines.Des stalactites quand on regarde en haut.Stalactite tite tombe ! !Stalactite tite tombe ! ! C’est pour se rappeler quand ça tombe.Quand ça monte, c’est stalagmite mite monte ! C’est facile !Vers cinq heure, cinq heure trente pas plus. De chaque côté du pont !Ceux du 15ième, c’était la bande de Falguière.Une voisine d’en face que je connais, elle, elle les a vu. Elle ne voyait pas les jeunes avecles bouteilles. Elle voyait les africains du 15ième. Elle a vu le pétard, sans savoir au début quec’était un vrai. Un jouet tout petit. Mais bon il a tiré avec.8Elle a appelé les flics. Un jeune homme qui n’avait rien à voir avec les deux bandes a couruen zigzag en se tenant le coeur. Un jeune homme qui passait par là. Un lycéen au coeurfragile. Sur le coup ils l’ont cru mort.Il est tombé devant ma fenêtre. J’ai vu des jeunes aux visages ravagés.Comme une suspension et puis tout de suite les sirènes et les crissements de pneus.Quelqu’un avait appelé les flics. Ils sont arrivés comme dans les films, des deux côtés à lafois. C’est là que j’ai compris que c’était grave. Le corps dessiné sur le sol. La craie blanche.La rue bloquée.Quand ils sont descendus de leur voiture on aurait dit des vrais cow-boys. Je ne sais pasbien ce que j’ai compris sur le coup. J’ai vu l’attroupement, qu’ils étaient plus nombreux qued’habitude. Je n’ai pas vu le sang.Toutes les bouteilles éparpillées.Juste une crise cardiaque due à la peur. Il a couru en se tenant la poitrine.En pleine rue, un jeune homme de 18 ans tombé sans raison.Personne n’en a parlé dans la presse. Juste un entrefilet dans Le Parisien. Un coup, lesjournalistes font un scandale et un coup, ils oublient qu’on existe.Moi, je suis ce jeune homme dont le coeur ne résiste pasJe cours en pleine rue comme lui, je m’appelle Joachim.Je suis une torche enflammée mais vous ne me voyez pasJ’ai mal à mon monde, à mon oeil brulé par le gaz lacrymogèneJe hurle et vous ne m’entendez pasEt je tombe sur le pavéJe pleureJe tombe et je n’arrive plus à me releverDerrière le cordon de policierAlors ne me demandez pas de faire mine de rienDe rester correcteToujours habillée correctpoli-acryliquement correcteAvec ma carte d’identité sous plastiqueJ’ai lu les gros titres des journaux publiés dans mon pays qui va si bienMon pays civiliséDes gros titres affichés comme des gros motsLa crise de la « France française » est passagèreEt je répète la crise de la « France française » est passagère (bis)L’état va bienTout va bienMon état va bienEt que ceux qui n’ont pas pu venir à la Fête de l’Humanité viennent à la Fête de laFraternité !!Je hurle vous ne m’entendez pasMoi je suis Joachim qui a perdu son oeil à MontreuilUn oeilUne tragédie toute crueUne tragédie de RueUn oeil de perduUn policier qui tire / Flash - Flash-Ball – FlashEt Flash tu l’as dans l’oeilDes balles en caoutchouc / Flash- Flash-Ball – Flash9Un policier a tiré / Flash- Flash-Ball – FlashIls étaient 50 et alors ? 50 dans la rue pour soutenir les occupants d'une clinique désaffectéesoutenir tous les expulsés - expulsés le matin mêmeDes projectiles en caoutchouc / Flash - Flash-Ball - FlashEt Flash tu l’as dans l’oeilBarbarie barbare qui s’invente sous mes yeux/ Flash - Flash-Ball - FlashJ’en ai encore deux - des yeux – deux yeux/ Flash / Flash je fais la photo/ Flash / Flash t’as les yeux rougesFlash ou sans flash sans flash dans les yeux/ Flash - Flash-Ball - Flashça s’appelle : Incidents gravesUn oeil de perdu - dix de retrouvés ……/ Flash - Flash-Ball - Flashet voila qu’apparait notre futur Oedipe/ Flash - Flash-Ball - FlashGros titre dans la presse : « Le retour du cyclope »Un oeil ensanglanté au milieu du front.- Cyclope fils de personne / Flash- Cyclope retourne chez ta mère / Flash- Cyclope t’as pas un clopclop clop clop clop clop clop clop clopJoachim tu iras au tribunal et c’est tout !Et tu iras clopin-clopant voir le gars de la BAC qui t’as tiré dessus, le gars de la BACspécialisé dans la violence urbaine et le gars de la BAC // Brigade Anti Criminalité le gars dela BAC QUI a si bien visé, qui t’as si bien troué ce gars là que la presse ne nomme pas cegars la de la BAC n’était pas une brutasse !!Alors imaginez que si ce gars de la BAC avait été une brutasse c’est sur que tu auraissurement perdu les deux yeux et là on l’avait notre Oedipe de MontreuilNotre Oedipe parfaitles Flash - Flash-Ball - Flash sont utilisés trois fois par jour en moyenne rien qu'en Seine-Saint-Denis.Je n’ai pas toutes les statistiquesStatistiques tiques tiques tombeDramatiques tiques tiques tombeEt Tombent les chiffresEt Tombent les têtesParis ! Saint Denis ! Montreuil ! Paris !J’ai en moi un Paris qui débordeUn Paris au sang cailléUn Paris qui hurleUn Paris mal digéréParis je hurle mais tu ne m’entends pasEt mes larmes, qui les boira ?Mon gamin capuchonné ce jour là était un jeune sans yeuxPourtant je pense qu’il ne vit surement pas loin d’ici. C’est ce que j’ai dit au commissariatquand j’ai déposé plainte.Ce jour-là, j’ai été choquée.La violence c’est un choc même si ce n’est pas la première fois, on ne s’y habitue pas. Laviolence ça marque !10Elle fredonneSur mon corps tout passeDe main en main, je passeSous le nez je te passeDe la peur à la colère je passeSur tes défauts je passeMon chemin, pour toi je passeDe la cave au parking comme tout le monde j’y passeSur les détails, je passeUn mauvais quart d’heure je passeDes heures muettes sans parole je me fracasseDe commentaires, je me passePas de chez moi chez toi / pas de chez toi chez moi (bis)Alors je me casseComment ça se passe ?Tu te casses je me casse on se casseDu fric qui s’en passe ?Pour toi le cap je veux bien qu’on le passeAvec toi, à tabac, sans tabac je veux bien qu’on le passeDes heures je t’attends et puis mon tour je passeLa main dans mes cheveux, je passeMal, j’ai mal, mal, mon envie, de toi, sur toi, mal, prend toute la placeEt toi l’arme à gauche tu dis que tu passesSous un train, tu veux que l’on passeMoi, dans le vent sous le ciel je t’embrasseEt comme les feuilles mortes je me ramasseJe me ramasseEn deux, pliée à m’en faire péter les jointures, je t’embrasseTes lettres, ta photo, ton ossature pointueJ’embrasse et j’enlaceJ’enlaceJ’enlaceEt comme les feuilles mortes je me ramasseJe me ramasseLasseHalasseLasseLasseMa grand-mère elle disait qu’il faut tenir les coups, non tenir le coup, garder la tête haute,tenir le coup, ne pas se plaindre, tenir le coup supporter, ne pas lâcher, ne rien dire, resterdigne ! Elle a été foraine toute sa vie alors elle sait de quoi elle parle !Ma grand-mère, elle a tenu un stand, elle a tenu une épicerie toute seule ! Ma grand-mèreelle a tenu le coup et elle a connu deux guerres.Paris une ville occupée !!Paris une ville sans yeux !!Ma grand-mère a résisté.Et moi je hurle mais vous ne m’entendez pasMa voisine elle, elle crie ! Et quand je dis elle crie c’est qu’elle crie vraiment ! Elle crie fort.Fenêtres fermées ou ouvertes c’est pareil toute la rue peut l’entendre.11Elle crieElle hurle avec son mariAvec ses enfantsAvec quelqu’un au téléphoneElle crie ma voisineelle crie.D’ailleurs je crois même qu’elle ne sait pas parler normalement elle crie pour parler enquelque sortePour qui pour quoi elle crie si souvent ? C’est qu’elle est bavarde !Je ne risque pas de lui demander pourquoi elle crie, car elle me répondrait en me hurlantdessus et je n’en saurais pas plus.Ce n’est pas des questions qu’on pose à sa voisine.Alors je reste immobile et plus ses cris montent et plus je suis paralysée je reste à l’affutj’écoute les cris qui montent avant les coups.Les coups au moment où les cris ne sont plus supportablesAu moment où je me dis que moi aussi je voudrais crier pour empêcher ses crisAu moment ou je sens que tout bascule je voudrais et je ne fais rien je voudrais et plus çamonte plus je reste là immobile et alors dans ce suspense alors oui arrivent les coups lescoups, les coups sourds et sombres les coups qui tombentEt le cri se transformeOn a peurOn trembleOn entend et ne veut plus entendre et on tend l’oreilleOn se tapit et on écoute, on é encore, encore plusEt on a malCorps immobile spectateur et dans mon regard se mêle désespoir et fascination. C’est unmalaise qui me fais trembler et me donne la nausée.C’est que je voudrais tout entendre tous les détails et reconnaitre un mot un seul quim’aiderait à comprendre c’est pour cela que je reste pétrifiée.Sa voix horrible qui gueule sur tout qui gueule vitre ouverte claquement de porte cette voixqui outrepasse les mursSa voix comme si c’était la mienneSa voix comme ma soeurSes yeux noirs haineux le ton secMoi figée comme une statue qui veut entendre sa voixM’entendre dans sa voixQuelle est cette curiosité au fond de moi qui me fait malElle hurle et je contemple la plaie ouverte de ma violence.L’orage qui grondeEntre les mots mal coordonnées de sa langueDe ma langueCette langue ordurière qui force sa boucheMa boucheSouvenir et grimaceFaites qu’elle se taiseAvant qu’elle ne brule à la cigarette ma sonnetteSilhouette hirsute collée au paillassonJe ne veux pas la voirPas l’avoirJuste l’entendre pour prendre une revanche surPour épier en elle ce qui me ressembleSa gueule ouverte qui ne retient plus12Sa gueule ouverte sans retenueSon monde hurlant comme tous mes ennemis réunisFlux et reflux d’une mer monstrueuse qui déferle hors de son appartementsa violence est à l’étroitSa violence oppressée s’enflammePar delà le murJe me tapie et je pleureFrottement des mots, des corps, des tissus, brisures, éclats, fracture, qui pénètrent si fortles pièces de vieUne vie encadréeSa violence me fait peurPeut être j’ai plus peur d’elle que de la violence de mon gamin capuchonnéGamin pourtant tu m’as cognéGamin toi qui n’as pas ouvert la boucheMon gamin « enviolenté » qui en silence est entré et qui, sans mot, sans attendre, a frappé,frappé, frappéCe gamin qui m’a frappé sans signature m’a laissé au coeur un émoiEt moi ? Et moi ? Et moi ?Saoud pourquoi es tu parti ?Saoud, je suis la bouche éventrée, remplie de courants d’airJe suis la bouche videSaoud dis-moi où tu es ?Comment est-il le monde que tu vois ?Saoud dehors des gens marchent d’un pas nonchalantSaoud le vent agite les arbres de la rue comme une caresseAujourd’hui il fait presque beau au dessus des toitsSaoud je vais te raconter un peu qui je suisAu-delà de mon identité de façadeDu début de ma vieMa vieEn morceaux.C’est une histoire de mères, de mères épouvantables, de mères épouvantéesMoi aussi, je suis née d’une mère et ma mère est un monstre.C’est juste de commencer avec elle. Avec son ventre. Moi le foetus. Elle dit volontiers à toutle monde qu’elle accouchait comme une lettre à la poste. Encore faut-il ne pas être lapremière lettre. Et moi je suis la première. On peut dire l’aînée. Aujourd’hui on est six.L’aînée de six. L’histoire de la fratrie, de l’écriture familiale ça commence avec moi.Un an après leur mariage le classique de la famille catholique qui se débrouille pas trop maldans le domaine de la reproduction.On se marie, on fonde une famille alors moi je suis le début de la famille.Ils sont impressionnants sur la photo de mariage. Noir et blanc. Grand tirage, unphotographe ! On pourrait croire que ma mère est belle sur la photo, mon père aussi maismon père il est vraiment beau surtout que je ne l’ai pas vu vieillir. Il est mort quand j’avaishuit ans.Alors c’est une bonne combine pour rester beau. J’ai eu sa photo très longtemps dans monportefeuille en cuir, pas celle du mariage, une autre. On en a fait plein de tirage de cettephoto, la photo qu’on a distribué à sa mort, la même pour tout le monde.Quand j’ai eu plus de huit ans et que j’ai regardé ce souvenir en noir et blanc j’ai vu que laphoto avait été retouchée. La photo de mon père vivant en noir et blanc, la dernière photo.13Et bien il était quand même beau. D’ailleurs quand j’étais petite, j’étais très fière de sa beautéparce que l’on me disait, ou on disait à ma mère, que je lui ressemblais.Les gens avaient une façon très spéciale de m’observer en étant très concentrés, de me voiret de ne pas me voir jusqu’à en conclure l’oeil ravi et ému : “ C’est tout Jean-Jacques. ”Jean-Jacques c’est le nom de mon père, enfin le prénom, son nom c’est le mien.Je porte le nom de mon père, Saoud.Je n’ai pas épousé ton père et encore aujourd’hui je ne vois pas quel autre nom je pourraisporter.On ne choisit pas son père, on ne choisit pas son nom. Les femmes qui prennent le nom deleur mari je n’ai jamais compris. On naît une fois et on a un nom une fois pour toute.Je suis née donc le jour de la fête de la saint Jean. J’aime bien savoir ça, même si je suis laseule à le dire, à le savoir. Mon anniversaire n’a jamais été un grand feu. Je suis née en ville.Peut-être que si j’étais née à la campagne j’aurai vu les gens autour de moi sauter audessusdu feu.Mon grand-père maternel s’appelle jean et mon père Jean-Jacques mais ça je l’ai déjà dit.Deux Jean derrière moi pour moi qui suis née le jour de la St jean.Je suis née, je suis la première à être sortie de ce ventre là.Du ventre de ma mère.Je suis née avec les cuillères à salades.Les obstétriciens appellent ça les forceps. Forceps cela fait penser à fort et à biceps ça faittrès masculin comme instrument. Ça doit être en métal comme le truc qui permet d’explorerle vagin. Je crois que cela s’appelle le speculum.Les médecins aiment le métal, question de nettoyage je présume !Forceps, cela fait savant mais c’est exactement comme des grosses pinces à salades ou àspaghetti, chacun voit selon sa culture.J’ai dans mon tiroir à la maison une pince à spaghetti.On la tient entre les doigts comme une paire de ciseaux et on prend les spaghettis avec.Cette pince je l’ai trouvée dans une poubelle rue Vercingétorix. Sans chercher vraiment,comme ça en passant.Moi je ne suis pas arrivée en passant, il a fallu me sortir. Les forceps !Les forceps, donc se sont deux cuillères face à face que l’on peut fermer l’une sur l’autrecomme une pince. Cela sert à prendre le crâne. On pince et on tire. On prend bien le crâneet on tire. Dans le petit Robert ils disent : “ qui sert à tirer la tête du foetus pour en faciliterl’expulsion ”. C’est le cas quand le bébé ne veut pas sortir ou que la mère ne pousse pas ouqu’il n’y a pas la place, que le bassin est trop étroit même si dans ce cas là quand le bassinest trop étroit selon moi ça ne sert à tien de tirer donc c’est plutôt si la femme démissionnedu genre plus la force ou le bébé trop haut qui n’est pas descendu ou que l’homme enblouse blanche en a marre d’attendre qu’il a faim et que ça ne peut plus durer ou que lemédecin a envie d’utiliser ses beaux outils.L’homme est celui qui utilise les outils.Les sages-femmes elles utilisent leurs mains et elles sentent avec leurs mains, avec leursdoigts. Une femme qui accouche en est à un doigt, à trois doigts, et à dix doigts c’est lemoment de pousser. Quand je suis née il n’y avait pas de sages femmes et pas de doigts,juste un homme et ses outils.C’était comme ça dans les familles bien et quand ma mère parle de cet homme qui a extraitma tête avec ses pinces elle prend un air très spécial et on doit comprendre que c’étaitquelqu’un de bien, de respectable un très bon accoucheur un homme réputé dans la ville eton peut dire : “ C’est le Docteur Brandebourg lui même qui m’a accouché ! ”14C’est une gratification, ça vaut plus ! C’est comme un bonus !On peut être fière d’être une femme accouchée par le docteur Brandebourg.L’outil en métal brandi ! L’outil ami de l’homme à la blouse blanche ! ! L’outil nécessaire !L’outil prolongement du bras de l’homme à la blouse blanche et l’outil dans la main au boutdu bras velu souvent nu sous la blouse. La pince à tête de l’homme en blanc l’homme prêt àpincer ! L’homme blanc ! L’homme crabe.C’est donc un crabe qui m’a fait sortir et tout cela est logique puisque je suis cancer.Cancer égal cancro égal cancre égal crabe le symbole du cancer c’est un crabe et le premierhomme que je vis fut un crabe.Une sorte de paternité médicale et astrologique à la fois.C’était une naissance très chic. Je ne parle pas de la sortie un peu difficile avec l’accoucheurtirant et suant à grande eau pour arriver à m’extraire, non je parle quand tout le monde estvenu me voir dans le berceau et que je portais la layette tricotée avec amour, tricotée main,tricotée maternel et un point à l’envers et un point à l’endroit un point pour saint Joseph unpoint pour saint Thomas.Je suis née à l’époque où on cultivait une tendre patience et une profonde barbarie.Donc une fois dans le berceau mon père est arrivé, il n’était pas encore mort.Mon père a regardé le petit paquet un peu rougeaud emmitouflé dans la laine, le petit paquetcouvert de cheveux noirs et il a été déçu que je ne sois pas un garçon.Un garçon c’est mieux ça ne se discute pas et des couilles j’en avais pas.Je ne m’en suis pas tirée trop mal parce que quand ma soeur est arrivée deux ans après et ila dit, j’en suis sûre parce que c’est ma grand mère qui me la dit et elle l’a dit plus d’une foisdonc a moins d’être sourd on ne pouvait pas faire autre chose que de le savoir, bref quandmon père a vu ma soeur il a dit : “ Je ne sais faire que ça ! ! ”Moi j’ai quand même un titre je suis l’aînée ! !Mais bon l’amour d’un père ? Je ne sais pas trop, vu que c’est plutôt moi qui me suisoccupée de l’aimer coûte que coûte parce que quand on aime ça fait durer la relation etj’avais besoin de cette relation. J’ai bien aimé l’histoire que l’on me racontait. Qu’il était auciel et qu’il me regardait et qu’il me protégerait.J’aimais bien me sentir spéciale avec mon père là-haut comme un ange !Ce n’est pas tout le monde qui a ça ! Mais aujourd’hui, si je pense à cet homme qui n’étaitpas content d’avoir une fille et bien cet homme là je ne suis pas sûre que ce soit mon père,c’est tout !Et comme on n’a pas pu en discuter ! !Il était beau sur la photo ! ! Très beau ! !Oui il était beau et moi je ne suis pas franchement belle, la beauté cela ne se partage pasJe suis françaiseAvec une identité bien conservée sous plastiqueJe suis française par facilité évidenceFrançaise sans délit de facièsFrançaise 100%Une française qui ne peut pas déteindre au lavageUne bonne citoyenne en règleQui hurle sans sonSaoud je suis sur le point de tomberDe tomber définitivementDans ma langue toutes les occasions sont bonnes pour tomber15Tomber amoureuse - tomber malade - tomber enceinte- tomber pour mieux tomber jen’arrête pas de tomber.Tombée à deux mois de la gazinière, je me suis tortillée comme un vers sur le carrelageDans la cuisine, ma première chute !Sans cicatrice.Tombée à deux moisUne chute du haut de la gazinièreLa dégringoladeJ’ai roulé dévaléComme un escalier de métroA toute vitesse la tête en l’airLe cerveau à l’airCO2 sensation de vertigeComme dans les escaliers fait de trop de marchesDe 30 marchesMon cerveau trop vite sur le carrelageLe choc ressenti dans la chair - sans les yeuxÀ deux mois on tombe sans voirAvec des yeux sans regardOn tombeUne chute sans yeuxVertige garantiMieux que le saut à l’élastiqueLe coeur qui se serre, les yeux qui tournent à vide, pupille pâle, bras incontrôlés qui pendent !Une secousse sans les yeuxDans les escaliers du métro mes pieds avancent tout seull’un après l’autre sur la bonne marche, à la bonne hauteur,Sans les yeuxMes pieds à la hauteur de la situationSans les yeuxAutomatisés l’un après l’autreDe haut en basOn dévale du haut vers le basCar c’est du haut que l’on chutePas de chute sans hauteur.La hauteur des marches / chaque pied / la hauteur de l’escalier / le pied / la plante du pied, lamarche, le pied, la marcheEt avec le genou ?VertigeHaut de coeurHaut les coeurs qui dégueulent au dessus des marches que l’on dévalehauteur beaucoup trop hauteHauteur de ma propre hauteurAuteur !!!Corps suspendu au-dessus des pieds agiles qui avancent tout seulEt ma tête ? Et ma tête ?La tête chute, décroche et rouleChute, perte, corps qui déboule, qui dégringole, roule, heurte, se fracasseMon corps en bas des marches qui se tord comme un ver, qui se disloqueMon corps de grande personne qui ne peut plus rebondir et qui se fend en deux sur la 24ièmemarcheUn corps né français, durci par la vie qui a perdu la tête16Un corps qui se heurte à son identité incontrôléUn corps voué à la chuteUn corps qui tombe sans raisonUn corps gisantPiétiné par la foule qui avance inexorablementCerveau de bébé écrasé sur le solCervelle en chute libreMa vie sans vieUne évidence d’en basAu pied du même escalierToujours obligée de m’arrêterAu pied ! Au pied !NonJe vaisDeboutJe peux rester deboutJe peuxJe suis capableCapableDe faire attentionAttentionIl n’y a pas de risqueJe sais contrôlerContrôlerContrôler ma vie françaiseMes pieds// Gardez vos pieds bien à plat// Gardez vos pieds bien à platMoi je suis françaiseJe ne suis pas contrôlée à la sortie du tapis roulant de MontparnasseJamais contrôléeJamaisAlors ma tête sans mes pieds peut bien rouler toute seule dans les escaliersTête incontrôlée comme une boule de billardJetée du haut des escaliersÀ deux mois la tête roule sans les piedsPapier ! Papier ! Pas pied !! Je n’ai plus piedPapier ! Contrôlé ! Ma tête sans les jambes ! !Ma photo écrasée sous le film plastiqueMon visage a chutéParachuté !!Dans le métro l’identité couchéeSaoud, je me suis écraséeSaoud, j’ai chutéSaoud, j’ai compté les marches de l’escalier pour ne pas tomberSaoud j’ai mal comptéElle fredonneC’est moi Gigi la tonduePoignet tordu poing tendu10 ans dans le bocalCrâne tondu17Avalez mon procès de merdeDesserrez les dentsJugez mes cheveux arrachésRêvez la nouvelle coiffureSi vous en êtes capablesCar le cheveu est pensée, pensez donc !Avalez mes cheveux abandonnés dans l’escalierBandes de tordusTordus tondus du culFoireux farcis sans amourEtat de maladeDégorgez le mot mentalFatalLe coup claque, plus de polaroidMa photo ? Vous avez vu ma photo ?Allez direct à la policeMon visage dégueule de la façadePortrait de mon absenceSurveillez-moi le bocal, bande de paranoïaque!Sortez vos chiens !Je suis au centre de la terreLe ventre de ParisPrête pour le grand défiléMessieurs, remballez vos vies aveuglesDéracinez les poireaux dans vos yeuxMon cerveau au KérosèneMa peau tendue comme un tonneauJ’habite la terreGazomètre à fond les manettesLes seins en mitrailletteOuvrez-moi le crâne et venez boire mon âme enflamméeHommes de métal endimanchésMon cerveau sera mon cadeau à l’humanitéUn cadeau truffé d’idéesMoi GIGI la tondueDans mon cerveau la blessureMangez mes idées en tonsureVous les représentants d’un état faméliqueMon cerveau sera mon cadeauOuvrez-moi le crâne et mangez mon cerveau !USE IT OR LOOSE ITSaoud, où que tu sois j’espère que tu entends mes mots écrits au-delà de mes crisSaoud, tu me manquesSaoud, si je crie maintenant avec ma voisine c’est parce que mon capuchonné continue deroder dans ma têteJe le vois entrer comme un léopardJe le vois en face de moi prêt à me bomberEt je suis sa proieLui avec sa bombe, léopard sans yeuxIl m’a fait taire avec sa bombe lacrymogène18J’ai crié et je me suis tueMon léopard caché sous sa cagoule m’a fait taireJ’ai eu le souffle coupé puis la terrible brulureEt les larmes qui inondent les yeux éblouisEt puis j’ai vu un perroquet voler dans le ciel en plein Paris et je l’ai trouvé beau.C’est une jungle Paris. Les léopards sont souples, leurs yeux sombres et aiguisés percentles murs.Ils sont en bande, les plus petits léopards grandissent et deviennent des chasseursintraitables, babines au vent ils deviennent des tueurs au regard de braise. Toujours prêts àchasser pour ne pas disparaitre. Le léopard est en voie de disparition. C’est une jungle Paris.Saoud, mon gamin à capuche m’a pris mon dernier cri. Je suis au bout du bout !Saoud, j’ai gardé ta lettre, celle que tu m’avais écriteMamanMaman, je veux un uniformePour moi mais aussi pour toiJe t’expliqueJe veux un uniforme efficacePour nous sortir de la mouiseNike m’a beaucoup déçuEt ne crois pas qu’Adidas ou Puma pourrait changer notre situationNon il me faut un vrai uniforme professionnelEt je peux te dire que c’est le bon moment pour investirOn n’a que l’embarras du choixJe ne veux pas une imitationNon, un vrai uniforme qui fasse bonne impression, qui en imposeUn uniforme qui soit utileIl y en a toute une panoplie maintenant dans les rues, à Monoprix, dans les bus, partoutMoi j’aimerais mieux un uniforme, un peu comme celui des gars du parkingIls ont un uniforme tout noir et dans le dos il y a écrit en lettres lumineuses : SECURITEUn uniforme professionnellement conçu pour la sécuritéC’est écrit SECURITE et ça veut dire :La sécurité vous savez où la trouverLa lire c’est l’adopterSECURITE : c’est écrit, c’est facile à comprendreIl suffit de lire. C’est comme « sortie de secours » dans un magasin.Tout le monde comprend.Les gars, ils ont le mot SECURITE collé dans le dos pour qu’on le lise dès qu’on en a besoin.Avant de rentrer dans l’ascenseur on lit SECURITE et ça donne du baume au coeurDevant le parking, on le lit et on est rassuréAvec SECURITE devant les yeux, on rentre chez soi et l’effet des lettres lumineuses durantun certain temps, on passe une soirée idéaleUne soirée sécurité 100%Ce n’est pas idiot du tout comme systèmeIl y a des mots dont on a besoin pour bien vivreEt comme il n’y a pas beaucoup de gens qui regardent le dictionnaireCa facilite la vie de tout le mondeLes gens lisent SECURITE et le tour est joué.Ils savent que tout ira bien dans les escaliers, à tous les étages, dans le parking, dans lelocal à poubelle, dans le local à vélo, chez eux, chez le voisin, partout…SECURITE : c’est magique19Ca clignote longtemps dans les têtesCa aide pour se sentir bienMais toi, maman je crois que SECURITE ce n’est pas le bon mot pour toiLeurs chiens, ils te font peur à chaque fois que tu passes à côtéToi SECURITE, ça te fait l’effet contraireTu n’oses pas avancer quand tu vois SECURITE et leurs chiens avec leur muselières et lestatouages sur les bras des gars, et après tu rentres à la maison en tremblant et tu fumessans t’arrêterAlors, moi Maman, puisque c’est moi le gars de la maison, je t’explique ce que je veuxJe veux un uniforme completUn uniforme professionnel avec une inscription dans le dos.Seulement sur mon uniforme dans le dos il y aura écrit AMOURMais il faut que ce soit un vrai uniforme pour que ça marche, que cela te fasse du bienVoilà, je voulais te demander où achète-t-on les uniformes ?Il y a de plus en plus de monde qui en porte et je n’en ai jamais vu dans les boutiquesJe ne sais pas non plus où on les fabriqueAlors si tu peux me rendre ce service et te renseigner autour de toiVu que là où t’es, ils en ont tous des uniformesJe veux un uniforme noir ou bleu marine, qui fasse bien sérieux avec écrit dessus AMOURen grosses lettres majuscules d’imprimerieDes lettres lumineuses que l’on peut lire dans le noirCar j’ai remarqué que c’est pendant la nuit qu’on se demande le plus si l’amour existeAlors quand tu seras guérie de ta dépression et que tu rentreras à la maison, tu pourrasregarder aussi longtemps que tu veux mon uniforme avec écrit AMOUR en grosses lettreslumineuses, et alors tu sauras que tu peux compter sur ton fils et que vivre n’est pasimpossible.Ton fils uniqueMerci Saoud, merciAujourd’hui, je regarde ParisJe vois une guerre qui n’en finit pas de gronder et qui s’infiltre dans les têtes.Une guerre de sueur et de larmes.Une guerre d’orage entre éclair et tragédieUne guerre de misère non déclaréeUne guerre quotidienne aux gants blancsUne guerre qui pénètre les têtesUne guerre de percussionUne guerre de persécutionSaoud, avant que cette guerre qui tape ne me prenne mon cerveauAvant qu’elle ne me frappe, je testamenteraisContre mon pays hypocriteContre le viol historiqueJe testamenteraisJe ferais surgir sue le tapis roulant du métro à Montparnasse un grand défilé de « mot –viande » bleuie qui regarderont le monde des contrôleurs d’identitéDes mots de toutes les couleursJe testamenteraisContre toutes les fictions stérilesContre les vies banalisées interchangeables20Contre l’identité mensongèreContre les noms voilésContre les cartes d’identitéSaoudJ’ai mis le feu au chandelierLa cartouchière greffée sur ma peau de blanche aseptiséeJe ne suis pas faite pour l’amour mais pour être incendiéeJe vais me finaliser, me final finalement à l’ElyséeRespirer l'alizé pour ne plus chuterMe transformer en montgolfièreEt percer le ballon de la colère« J'enrage de mon encre, de ma plume, et du pauvre vocabulaire dans lequel je tourne enrond comme un écureuil qui croit qu'il court."Jean Cocteau - Journal d'un inconnu. 1953Je me suis brulée les ailesIl me reste ma brulure que le vent rallumeFolie ! Folie!Je tombe de risquer de tomberCrane défoncéDix ans dans le bocalJe ne veux pas tomber dans la médiocritéJe suis toujours sur la mauvaise marche« Quelle beauté !! » dit l'étrangerCouchée la femme« On se connait ? » dit l'étrangerAu sol la femme éventrée« On s’est déjà vu quelque part ? » dit l'étrangerLa femme dans le passage« Quelle beauté !! » Dit l'étrangerElle tombe de ne plus se relever la femmeCrane tondu poing tenduAvant de tomber« On se connait ? » dit l'étrangerFils amant guerrier violeurVous qui brandissez toujours votre queue dans le sens de l’histoireRelevez la femme qui tombe« On se connait ? » dit l'étrangerElle tombe de ne plus se relever la femme« Amis - amis !! » dit le français légitiméEntre les coups et les jurons« Amis - amis !! » dit le français légitiméMots concassés enfoncés dans les têtesChaos d'avant la naissance« Je veux t’épouser !! » dit l'étrangerSaoud ?Tu le vois l’homme ?L’homme aveuglé ?L’homme entrainé ?21Prêt à violer ?Tu le vois l’homme queue en avant qui saute au dessus des cadavres ?« Je veux t’épouser !! » dit l'étrangerSaoud je ne peux plus payerAvancer, avancer pour quelle liberté ?C’est moi Gigi la tondue, poignet tordu poing tenduvingt ans dans le bocalFoetus hospitaliséSaoud mon temps est dépassé// Flash flash Ball flashOn sonne les trois coups// Flash flash Ball flashLes aiguilles trottent à l’envers place de la ConcordeEt l’obélisque se dresse prête à me violer// Flash flash Ball flashPhallus consacré// Flash flash Ball flashLeurs couilles comme un trophée// Flash flash Ball flashEt des millions de bébés japonais déboulent place de la ConcordeSaoudJe dois m’arrêterTu n’es plus là SaoudJ’ai gardé longtemps ta voix sur des cassettesJ’ai écouté - j’ai hurlé - j’ai effacéTa voix a disparu - j’ai enregistré par-dessusOn marche toujours au dessus de nos mortsJ’essaye de ne pas tomberLes oranges sont dans le sucre et moi aussi on diraitFigée dans le box des accusésFrançaise d’une France endimanchéeCoeur rouge sangLa chair plus noire que le charbonJe hurle mais vous ne m’entendez pasC’est moi GIGI la tondue30 ans dans le bocal !Saoud, si l’homme au sexe dressé me dit qu’il me connait, je le regarderais droit dans lesyeux et lui dirais : « J’ai vu une centaine de corbeau s’arrêter rue de l’Ouest au bord de lafalaise. »Épilogue d’une utopieCoeurs chéris ! Coeurs d’enfants ! Coeurs meurtris ! Coeurs malades !Nous avons retrouvé le coeur de la planète !Vivant, Messieurs Dames, vivant !Laissez tomber la matérielle nourriture !Abandonnez les coeurs d’artichauts et les coeurs de palmiers !Ce n’est pas de la conserve que je vous propose !Mais la possibilité de venir vous réchauffer au grand coeur de la planète !Nous l’avons retrouvé après de nombreuses recherches.Un coeur plus rouge que la vie !22Celui qui bat pour tous ! Et en chacun de nous !Messieurs Dames il s’agit bien là de l’organe central !En exclusivité entre Pernety et Plaisance, et pendant toute la semaine, je tiens à votredisposition le grand coeur de la planète ! Le viscère musculaire essentiel à la bonne santé detous et de toutes.Ce coeur vient à vous, il vient chez vous !Voisins, voisines, à votre bon coeur !L’instant est organique !Ouvrez vos oreillettes et écoutez ! Musique !C’est un coeur qui bat, qui ne bat que pour vous !C’est un coeur qui ronfle ! C’est un orgue à genoux !Venez, venez vous réchauffer au grand coeur de la planète !Galilée l’avait vu dans un rêve suspendu dans la nef centrale de la cathédrale de Pise !Ce coeur pyramidal, retrouvé à 20 000 lieux sous les mers, s’était égaré et brassait sans finles océans ! Musique !Écoutez battre la pulsation ! La pulsation ancestrale !Je vous parle à coeur ouvert !Laissez le vent d’ouest souffler et tournoyer autour de Montparnasse !Il n’en finit pas de s’étourdir ! Il n’en finit pas de s’engouffrer !Laissez-le perdre haleine au pied de la tour ! Puis monter vers le ciel ! Ephémère ventilation !La vie est là derrière cette porte !Écoutez l’appel du coeur ! Du coeur de la planète ! Musique !Venez, venez vous réchauffer!Il vous attend ! Le fruit de vos entrailles est bénit !Que commence la valse des ventricules !Battons tous en coeur la mesure !!J’accueillerais dans l’ordre suivant :Les cardites, les peines d’amour, les coronarites, les coeurs ensanglantés, les péricardites,les raz le coeur, les myocardites, les coeurs assoupis, les endocardites, les coeurs sur lamain, puis les collapsus, les blessures sentimentales, les cyanoses, les essoufflements, lesdyspnées, les coeurs bafoués, les écoeurements…Lecture spectacle joué lors du festival « Art en exil » // 2009
La Compagnie Bouche à Bouche - association loi 1901 - 2/4 rue du général Humbert - 75014 Paris - 01 45 39 55 38 - contact@cieboucheabouche.comTous les contacts