Je suis impressionnée, quand tu portes un intérêt pour moi, quand tu parles de ma vie, que tu me scrutes, c’est louche,
c’est lourd, c’est trop près de moi. J’ai peur de connaître ce que tu penses. Je ne sais pas quelle place je dois tenir, quelle place tu as dans ma vie, comment te relier, comment t’écouter sans perdre pied, comment entendre tes jugements, tes aprioris, tes déclarations de guerre, moi qui brandis le poème entre deux platanes, entre deux rêves, moi qui me glisse main tendue dans le chaos, moi qui clignote d’espoir dans la nuit. Toi, tu me cherches, tu veux me posséder, me convaincre, me contredire et tu me presses, et je suis troublée par toi qui deviens tout autre et je me méfie de ton envie de te rapprocher de moi, de m’entourer, de me récupérer, tu es déjà trop près et je sens que je ne pourrais plus revenir en arrière. Te connaître est dangereux et il y a un piège, ta grimace ne me permet plus de rêver, d’être libre et d’aimer à ma vitesse, à ma façon. Je suis impressionnée par cet absolu que tu brandis en vainqueur, par tes interdits, par tes mensonges. Mais je fais un effort, je fais de plus en plus d’effort pour continuer à t’écouter. Le sordide, le danger je voudrais le capturer pour le détruire. Mais je ne te supporte plus parce que ça fait mal. Demain, quand tu frapperas à ma porte, toi qui me fais peur, j’essaierai d’être vivante pour te surmonter, j’essaierai de sourire pour déconstruire la violence, la guerre, le racisme, j’essaierai de te raconter une fois encore mes doutes, mes espoirs, au prix de ma vie car elle a un prix. Je soulèverais tout ce qui pèse pour que le cauchemar s’envole. Je t’attends, je parle sans trembler, je suis prête,
je reprends des forces et je t’attends.